L’accès à une alimentation saine, durable et de qualité est une préoccupation croissante pour de nombreux citoyen·nes. Toutefois, le coût de la vie ne cesse d’augmenter, notamment celui des denrées alimentaires, forçant de plus en plus de personnes à n’arbitrer leurs choix de consommation qu’en tenant compte du prix.
Les acteur·ices de l’agriculture biologique, pleinement engagé·es dans une démarche de respect de l’environnement et de la santé humaine, sont désireux·ses de ne pas voir l’accès à des denrées saines et de qualité être seulement réservé à une certaine catégorie de consommateur·ices. Aussi participent-ielles activement à la réflexion et à la mise en œuvre de solutions concrètes pour favoriser l’accès de tous·tes à des produits sains et durables.
Ces initiatives, fondées sur les valeurs fortes de l’agriculture biologique, dessinent des projets de société souhaitables et réaffirment le rôle central que les acteur·ices de la bio entendent jouer dans la construction d’un système alimentaire plus juste et solidaire.
Cet article met en lumière les projets portés par les structures du réseau FNAB dans différents territoires et qu’il convient d’accompagner et d’amplifier.
Les précurseurs : les Défis Foyers à alimentation positive
Les Défis Foyers A Alimentation Positive (FAAP) sont portés depuis une dizaine d’années par l’ensemble des groupements d’agriculture biologique membres du réseau FNAB.
L’objectif de ces défis est de démontrer de manière conviviale que l’on peut avoir une alimentation savoureuse, bio et locale, sans augmenter son budget alimentaire.
Le principe du défi est simple : des équipes d’une dizaine de foyers (personnes seules, couples, foyers avec enfants) se regroupent pour relever le défi d’augmenter leur consommation de produits bio locaux tout en conservant un budget constant et en se faisant plaisir ! Il s’agit d’un accompagnement gratuit avec au programme : visites de ferme, échanges avec un·e diététicien·ne-nutritionniste sur l’intérêt des produits bio locaux et leurs apports nutritionnels, cours de cuisine, jardinage, trucs et astuces pour consommer bio et pas cher, conseils anti-gaspi.
Au fil des années, de plus en plus de défis se sont organisés autour de structures sociales qui orientaient leurs publics bénéficiaires vers ce dispositif, amenant à repenser certains conseils : il est par exemple moins évident de trouver des produits bio locaux en périphérie des grandes métropoles que dans leurs centres-villes. Mais les résultats sont là ! Près de 150 défis ont été organisés partout en France depuis le premier lancé en 2012 en Rhône-Alpes, et plus de 3 200 foyers ont participé à ces actions.
Côté consommation bio, les foyers qui ont suivi le programme consomment plus de produits biologiques (+10 points de pourcentage) et bio locaux (+ 9 points de pourcentage), tout en dépensant 41 centimes d’euros de moins par personne et par repas !
Penser une aide alimentaire bio locale : le dispositif P.A.N.I.E.R.S. porté par Bio en Hauts-de-France
Genèse
La déclinaison du sigle P.A.N.I.E.R.S. résume l’ambition : Pour l’Accès à une Nourriture Inclusive, Écologique, Régionale et Solidaire.
Somme des idées et des volontés de trois structures régionales engagées pour une alimentation saine et durable accessible à tous, P.A.N.I.E.R.S. né en 2018 de la coopération entre Bio en Hauts-de-France, le Réseau des AMAP Hauts-de-France et les Jardins de Cocagne Hauts-de-France et d’un soutien financier du Programme national de l’alimentation.
Le projet P.A.N.I.E.R.S. est un dispositif permettant aux bénéficiaires de structures d’aide alimentaire (centres communaux d’action sociale, associations) de recevoir deux fois par mois un panier de légumes bio provenant de fermes locales et de bénéficier d’un accompagnement au changement d’habitudes alimentaires au travers d’ateliers de sensibilisation (saisonnalité, équilibres alimentaires, lectures d’étiquettes, impacts des choix alimentaires sur la santé et l’environnement), de formations (techniques culinaires, à partir notamment des denrées du panier) et de visites de fermes.
L’objectif du projet ne se résume donc pas uniquement au nécessaire accès de tous·tes à une alimentation saine et durable. Il s’agit plus généralement d’accroître l’autonomie alimentaire en permettant à chacun de faire des choix appropriés à ses besoins, à ses moyens, en tenant compte des enjeux tels que la santé et l’environnement.
Les territoires concernés sont ceux de la métropole de Lille et des agglomérations de Douai, Béthune et Lens ainsi que deux territoires dans la Somme et l’Oise.
Déroulé
Les structures-relais identifient les bénéficiaires qui souhaitent bénéficier du dispositif (et donc participer à une prise en charge) et bénéficient d’une formation dispensée par Bio en Hauts-de-France sur les enjeux de l’agriculture biologique et de l’alimentation.
L’objectif est d’engager les foyers bénéficiaires dans le temps. Néanmoins, l’engagement financier à moyen et long terme est un frein lorsqu’on est en situation de précarité. Il est donc permis aux bénéficiaires de venir sans engagement et les résultats sont tout aussi positifs : 90 % des bénéficiaires prennent les paniers de manière régulière, facilitant le travail des structures-relais et des producteur·ices.
Bilan
Depuis le lancement du projet en 2018, 37 000 paniers ont été distribués dans les territoires qui portent le projet et plusieurs dizaines de producteur·ices et de structures-relais se sont engagés dans l’aventure.
Les résultats qualitatifs sont sans appel et les foyers qui reçoivent des paniers expriment leur plaisir de redécouvrir des produits frais, savoureux et sains.
Essaimer : la force d'un réseau
Le réseau de la FNAB, en proposant des instances de rencontre et d’échange entre salarié·es et administrateur·ices des groupements d’agriculture biologique départementaux et régionaux, est un espace d’élaboration et de diffusion de projets innovants, notamment en matière d’alimentation.
Inspiré·es par le dispositif P.A.N.I.E.R.S., les acteur·ices de Bio en Grand-Est (BGE), l’association des producteur·ices bio de la région, ont souhaité porter dans leur territoire un projet facilitant l’accès des publics précaires à davantage de produits frais et de qualité.
La déclinaison régionale de l’appel à projet « Mieux manger pour tous » lancée par la DREETS (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) en 2023 a donc été l’opportunité pour BGE de lancer A T.A.B.L.E., « vers une Alimentation pour Tous, Accessible, Bio et Local en grand Est ». L’appel à projet de la DREETS permet de financer l’animation du projet, l’organisation des ateliers dans les structures-relais et 20 % du coût des paniers. Les territoires partenaires participent à hauteur de 35 à 50 % du prix des paniers, le reste étant à la charge des publics bénéficiaires.
Concernant le périmètre d’action, A T.A.B.L.E. se déploie actuellement sur trois départements : à Joinville, en Haute-Marne, dans l’Eurométropole de Metz (Moselle) et sur deux pôles d’équilibre territorial et rural (PETR) des Vosges, (Épinal et Plaine des Vosges).
Alors que le projet n’a pas encore atteint son plein potentiel, A T.A.B.L.E. permet déjà à plus de 250 foyers et personnes bénéficiaires de la région Grand-Est d’accéder une à deux fois par mois à des paniers bio locaux, composés majoritairement de légumes et complétés par des légumineuses, des œufs et des produits d’épicerie, eux aussi bio et locaux.
Améliorer la qualité des approvisionnements des acteurs de l’aide alimentaire : l’exemple de la Loire-Atlantique et du GAB 44
Le Groupement d’agriculture biologique de Loire-Atlantique, le GAB 44, participe aux côtés de Terroirs44 à la planification de l’approvisionnement des structures de l’aide alimentaire du territoire du PETR du Pays de Retz, lauréat de l’appel à projets Mieux Manger Pour Tous.
Dans un premier temps, le projet se fixe pour ambition de cartographier les bassins de production et les caractéristiques des fermes du territoire, de recueillir les besoins des structures de l’aide alimentaire en produits bio et locaux, de faire se rencontrer ces deux écosystèmes et de créer du lien entre les fermes et les associations.
Cela doit ensuite découler sur la constitution d’une offre collective par les producteurs (gammes de produits, prix collectif, volumes…) et l’attribution de fermes aux différentes structures sociales. En 2024 et 2025, cet effort portera sur la planification en fruits, légumes et légumineuses.
Cette expérimentation permettra d’engager une réflexion partagée sur la question du prix et de la logistique ainsi que sur le modèle économique de tels projets hors subvention.
Article écrit par Valentin Cèze, chargé de mission commercialisation bio (FNAB)