Bio & PAT : je t’aime, moi non plus ?

Quelle place occupe l’agriculture biologique dans les Projets alimentaires territoriaux (PAT) ? Pour répondre à cette question, nous avons pris connaissance de deux rapports d’analyse sur le sujet et vous livrons ici nos conclusions.

Quelle place occupe l’agriculture biologique dans les Projets alimentaires territoriaux (PAT) ? Pour répondre à cette question, nous avons pris connaissance de deux rapports d’analyse sur le sujet et vous livrons ici nos conclusions. Une chose est sûre : il existe des marges de manœuvre importantes pour mieux intégrer l’agriculture biologique dans les feuilles de route des PAT

Le Focus de France PAT « Projets alimentaires territoriaux et Bio »

Dans son Focus n°1 de décembre 2024, France PAT livre une analyse sur la manière dont la bio est prise en compte dans les objectifs stratégiques de 451 PAT reconnus par les pouvoirs publics en date de l’étude. Le constat est sans appel : les PAT peinent à inscrire des objectifs clairs et chiffrés en matière de bio. Il est même indiqué que « seuls 14 PAT mentionnent le bio dans au moins un de leurs objectifs stratégiques ou dans leur nom ».

Les groupements bio locaux (GAB) interrogés dans le cadre de cette étude, relèvent plusieurs difficultés pour l’inscription d’objectifs clairs en faveur de la bio dans les PAT. D’une part, la priorisation est faite davantage sur le local qui ne garantit en rien des pratiques agricoles et des modes de consommation plus vertueux pour l’environnement ou la santé publique. D’autre part, les élus locaux sont souvent frileux dans leur engagement pour le bio, soit par méconnaissance des externalités positives de la bio, soit par crainte de la réaction des acteurs « majoritaires », soit en raison du contexte économique difficile que traverse actuellement le secteur bio.  Enfin, les moyens humains et financiers dédiés aux PAT restent largement insuffisants pour porter des actions ambitieuses sur le long terme et les incertitudes restent nombreuses quant à l’avenir des financements des PAT par les collectivités et les pouvoirs publics.

Pourtant, l’étude rappelle à juste titre que les Projets alimentaires territoriaux représentent une réelle opportunité pour développer l’agriculture biologique dans les territoires. Ce sont des lieux de concertation privilégiés qui réunissent une diversité d’acteurs facilitant ainsi la co-construction et la mise en cohérence des actions. Il est souligné que l’entrée « alimentation » est particulièrement porteuse dans les PAT et que des marges de manœuvre importantes existent pour que soient respectés les 20% de bio qu’impose la loi EGAlim dans les restaurants collectifs et pour faire progresser les achats responsables dans la commande publique des collectivités incluses dans des PAT. Ils peuvent aussi contribuer largement à la sensibilisation de divers publics par des actions ciblées au plus près des populations.

L’étude liste ainsi une série de leviers pour que demain, les PAT soient plus « bio » et conformes aux attentes sociétales. Citons notamment :

  • Mieux associer les acteurs de la bio dans la gouvernance des PAT,
  • Davantage travailler sur les circuits longs et la structuration des filières pour massifier les volumes de produits bio,
  • Travailler la planification des commandes et la contractualisation sur des prix et des volumes garantis entre fournisseurs de produits bio et collectivités,
  • Mobiliser et sensibiliser les élus aux enjeux du développement de la bio,
  • Dédier des moyens humains et financiers suffisants pour un accompagnement efficace, par les GAB notamment.

 

Les actions ambitieuses portées par le réseau des Territoires Bio Pilotes de la FNAB sont saluées dans l’étude. Ces collectivités apportent la preuve au quotidien qu’une politique ambitieuse pour la bio est possible dans les territoires, avec des effets positifs avérés dans tous les domaines : préservation de la qualité de l’eau, de la biodiversité et de la fertilité des sols, meilleure résilience climatique des territoires, amélioration des paramètres liés à la santé publique.

La place de l’agriculture et de l’alimentation biologique dans les démarches alimentaires territoriales de Gironde

Dans le cadre d’un contrat d’alternance en tant que conseillère territoire à Agrobio Gironde, Emma Fortin a réalisé un mémoire de recherche sur la place de l’agriculture et de l’alimentation biologique dans les démarches alimentaires territoriales de Gironde. Dans ce département, on recense 10 démarches alimentaires territoriales portées par différents échelons (PNR, PETR, Département, Communauté de communes) dont la plupart sont labellisées PAT de niveau 1 ou 2.

Les résultats présentés proviennent de l’analyse des entretiens menés auprès de 7 chargées de PAT, de l’étude des documents liés à ces PAT (feuille de route et programme d’action) et de l’observation participante réalisée pendant une année. La crise de l’agriculture biologique et de la consommation bio ainsi que le contexte agricole de la Gironde sont également à prendre en compte dans le résultat des analyses. Le département est en effet marqué par une forte crise viticole qui entraine un enjeu de transformation du paysage agricole et notamment du développement d’une agriculture nourricière.

Les termes local et biologique sont mis en opposition comme s’il s’agissait d'antonymes alors qu’ils sont complémentaires.

Le rapport d’analyse fait état de plusieurs constats qui recoupent ceux mis en lumière par France PAT dans son focus « PAT et bio ». Les éléments suivants ressortent particulièrement dans le mémoire. D’une part, la bio n’est généralement pas citée explicitement dans les feuilles de route ou programme d’action des démarches territoriales. Il est davantage question d’agriculture ou d’alimentation durable, d’agroécologique ou d’autres termes faisant référence à une agriculture prenant en compte des enjeux environnementaux. Toutefois, les démarches permettent l’accompagnement des producteurs bio, mais dans le cadre de stratégies plus globales autour par exemple de la gestion du foncier, de l’approvisionnement des cantines en produits durables en lien avec les objectifs de la loi EGAlim ou du développement des circuits courts. Il y a en effet une opportunité pour les décideurs de travailler avec les acteurs de la bio parce qu’ils sont les premiers à répondre aux critères d’agriculture durable que se fixent les PAT :  ils travaillent beaucoup dans des circuits locaux, sont souvent porteurs de projets d’installation, rentrent dans les critères EGAlim, etc. Ainsi, bien qu’ils ne soient pas défendus et soutenus explicitement dans les affichages politiques, de nombreux chargés de mission se tournent naturellement vers eux pour mener à bien leurs projets. 

D’autre part, le rapport souligne lui aussi la préférence qui est donnée au local plutôt qu’à l’agriculture biologique. « Les termes local et biologique sont mis en opposition comme s’il s’agissait d’antonymes alors qu’ils sont complémentaires. Le local renvoie à une notion de distance géographique entre le lieu de production et d’achat du produit alimentaire, le biologique renvoie quant à lui à des pratiques agricoles et plus particulièrement au cahier des charges du label AB ». Cette préférence du local tend à gommer les apports de l’agriculture biologique pour les territoires en matière de préservation du sol, de l’eau, de l’air, du climat et de la santé. De façon générale, il est noté une sous-représentation des enjeux environnementaux dans les démarches de territoire au profit des questions foncières et d’alimentation.

Le fait de ne pas inscrire d’objectifs explicites en faveur de la bio dans les feuilles de route des démarches territoriales s’expliquent selon l’auteur par « une volonté de ne pas privilégier un modèle agricole ou de ne pas les opposer afin de garantir la coopération de tous les acteurs au sein de ces politiques ». Les acteurs conventionnels semblent aussi plus écoutés que les représentants d’autres modèles agricoles car majoritaires en nombre d’agriculteurs et en surface agricole. Cela questionne sur les objectifs réels de transformation en profondeur des systèmes agricoles et alimentaires. Agrobio Gironde assure une présence active dans les réunions de concertation liées à ces démarches de territoires, mais pour l’heure cela ne se traduit pas encore en actions de développement fortes pour l’agriculture biologique. Un élément d’explication se trouve peut-être dans la gouvernance territoriale et les modes de participation à ces politiques alimentaires locales qui ne permettent pas à une communauté d’acteurs plus large, porteurs de projets alternatifs, de s’exprimer et d’être entendus.

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