Des filières de valorisation de biodéchets en compost utilisable en bio

Depuis juin 2023, la FNAB mène le projet MONA visant à mettre en place des filières territoriales de valorisation des biodéchets en compost utilisable en bio. Tour d’horizon des enseignements à quelques mois du séminaire de clôture, qui se tiendra au printemps 2025.

Pérenniser la bio sur le territoire

Le projet MONA – pour « matières organiques non agricole » – se fixe un objectif : pérenniser le développement de la bio en favorisant l’accès à de nouvelles matières organiques territoriales. Nous partons d’un constat de départ : en 10 ans, la France à perdu 30% d’élevage, réduisant d’autant la disponibilité en fumier, lisiers et fientes indispensables à la fertilité des sols bio. De nombreux travaux s’accordent aujourd’hui sur le fait que le développement de la bio risque, à moyen terme, de plafonner à cause du manque de disponibilité en matières fertilisantes issues des élevages. Il est donc indispensable, en plus du maintien des élevages, de rechercher de nouvelles sources de matières organiques.

En 10 ans, la France à perdu 30% d'élevage, réduisant d'autant la disponibilité en fumier, lisiers et fientes indispensables à la fertilité des sols bio.

Les agriculteurs bio ont un rôle à jouer dans la valorisation des biodéchets

Après plus d’un an de projet, l’intérêt des agriculteurs bio pour du compost de qualité est largement confirmé, particulièrement en grandes cultures et maraichage. La demande est là, reste encore à construire les filières. Si de nombreux territoires – rassemblés autour du « réseau Compost + » – ont mis en place des politiques ambitieuses de tri à la source, la majorité des biodéchets des Français sont encore incinérés ou enfouis. Le gisement potentiel est donc important.

Le projet MONA a pour but de favoriser la structuration de filières de compostage de biodéchets en partant des producteurs bio et de leur réseau (et c’est là son originalité).

A ce stade, on distingue trois manières d’impliquer les producteurs bio dans les filières de compostage de biodéchets.

L’agriculteur bio « client »

Le producteur bio a besoin de compost, il est prêt à payer pour ce produit. Il est le dernier maillon de la filière, mais le premier pour notre alimentation !

Dans ce cas, le rôle du projet MONA est de faire connaitre l’offre existante de compost aux agriculteurs bio et de faire connaitre la demande des producteurs bio aux collectivités. Celles qui hésitent encore à mettre en place le tri à la source seront incitées à le faire, et celles qui le font déjà pourront s’assurer, par une délibération des élus, que le compost aujourd’hui produit soit fléché en priorité sur les producteurs bio du territoire.

L’agriculteur bio « prestataire »

Le producteur bio est prêt à mettre une partie de son foncier à disposition, et à réaliser certaines opérations nécessaires au compostage (retournement, suivi des températures…) pour monter une petite plateforme qui produira du compost pour son auto-consommation.

Dans ce cas, le rôle du projet est de coordonner la mise en relation des différentes parties prenantes de la filière.

L’agriculteur bio « entrepreneur »

L’agriculteur bio engage un investissement pour construire une plateforme de compostage d’échelle industrielle et devient un acteur à part entière du traitement des biodéchets sur le territoire, en concurrence avec les entreprises du secteur des déchets. Le compost qu’il produit a vocation à être mis sur le marché (à destination des agriculteurs bio clients).

Dans ce cas, le rôle du projet est de faire connaitre aux agriculteurs bio l’opportunité que peut représenter la gestion des biodéchets, afin de favoriser l’émergence d’un profil d’agriculteur entrepreneur, ou encore de s’assurer que le compost issu de la nouvelle plateforme sera bien redistribué aux agriculteurs bio du territoire.

A chaque territoire correspondra un modèle cohérent de compostage en fonction des productions. Les besoins ne seront ainsi pas les mêmes entre un territoire à dominante viticole, et un territoire céréalier. Il convient donc de prendre en compte ce facteur dans la conception de la filière, en donnant la parole aux agriculteurs bio. Un autre aspect important à prendre en compte est la présence d'indésirables, aussi bien pathogènes que plastiques ou pesticides, dont la présence peut poser problème aux producteurs bio, soucieux de maintenir la qualité de leur sol. 

Comment développer l'initiative ?

Il n’y a pas de solution miracle ou de méthode réplicable partout pour la mise en place d’une filière : au commencement il y a toujours un acteur volontaire, prêt à prendre un risque (souvent un investissement) pour créer la filière. Cet acteur, c’est souvent la collectivité, ou le syndicat de collecte et traitement des déchets. Ca peut être parfois, comme on l’a vu, un agriculteur motivé. Tant que cet acteur n’est pas identifié, et que ce dernier n’est pas convaincu qu’il y a une opportunité à saisir, la filière ne démarrera pas.

Ainsi, notre capacité à mettre en place de nouvelles filières reposera sur notre capacité à faire émerger des agriculteurs entrepreneurs, ou à convaincre les élus locaux que le tri, la collecte et le traitement par compostage des biodéchets est LA solution pour une gestion plus durable et plus efficace des déchets.

Enfin, le compostage des biodéchets des ménages souffre d’un contexte règlementaire malheureusement très complexe et peu adapté au développement des petites installations de compostage à la ferme. Un dialogue constructif est déjà engagé avec le Ministère de l’agriculture sur ce point, qui favorisera, nous l’espérons, une clarification des exigences sanitaires du compostage.

Le projet MONA se déploie sur 5 territoires (Grand Lyon, Entre-Deux-Mers, Loir-et-Cher, Métropole de Lille, Pyrénées Orientales). Il fait intervenir, auprès du réseau FNAB et des collectivités, des structures expertes du compostage de biodéchets, comme le groupe de recherche RITTMO, le réseau des Agriculteurs Composteurs de France et le réseau Compost Plus. Enfin, l'Esa d'Angers intervient pour porter un regard réflexif sociologique sur notre travail.

Article écrit par Félix Lepers, chargé de mission réglementation (FNAB)

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