Les plaines et vallées de Niort • Captages du Vivier et de la Courance
(décembre 2019)
Le territoire des Plaines et Vallées de Niort est une zone où des dégradations sont observées à la fois sur le compartiment « eau » et sur celui de la « biodiversité » : pressions azotées, pressions des pesticides, pertes d’habitats. Plusieurs projets se développent sur le territoire pour reconquérir et préserver la qualité de l’eau et des milieux. Un des axes de travail consiste à diminuer ces pressions de pollution et de dégradation, en partie d’origine agricole, notamment via le développement et la promotion de l’agriculture biologique.
Deux types de structures bénéficient d’une échelle et d’un cadre d’actions suffisamment étendus pour mettre en œuvre les actions :
- le Centre d’Etudes Biologiques de Chizé (CEBC), laboratoire du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) agissant sur la zone Atelier (http://www.za.plainevalsevre.cnrs.fr/ ) en partie Zone de Protection Spéciale Natura 2000
- les deux services d’eau dont les bassins d’alimentation de captages sont inclus dans ce premier territoire
Territoire
- Service des Eaux du Vivier (SEV) et de la Vallée de la Courance (SEVC) • 24 communes • 90 000 habitants desservis, dont la ville de Niort (60 000 habitants) • deux services d’eau regroupés au sein de la Communauté d’Agglomération du Niortais (CAN)
- Deux bassins d’alimentation de captages de 310 km² (16 130 ha pour le Vivier • 14 904 ha pour la Courance), interceptant le parcellaire de 400 exploitations agricoles, situé sur le Schéma d’Aménagement de Gestion des Eaux (SAGE) de la Sèvre Niortaise Marais Poitevin
- Agence de l’eau Loire-Bretagne (AELB – SDAGE) • Région Nouvelle-Aquitaine • Département des Deux-Sèvres
Caractéristiques agricoles
- Productions dominantes : grandes cultures • polyculture-élevage
- Surface agricole utile (SAU) des AAC : 23 996 ha (11 775 ha pour le Vivier • 12 221 ha pour la Courance) dont 4000 ha en AB et conversion (54 agriculteurs bio), soit plus de 16 % de la SAU en bio (données 2019)
Actions mises en oeuvre
Le SEV et le SEVC ont chacun construit et mis en œuvre un premier programme d’actions visant la reconquête de la qualité de leur ressource en eau respective entre 2010 et 2014. Deux animateurs de bassin versant à plein temps assurent la mise en œuvre, la coordination et le suivi des programmes. Ces deux démarches s’inscrivent dans un dispositif régional intitulé Re-Sources (mis en place depuis les années 2000 sur l’ex-Région Poitou-Charentes et maintenant sur la Nouvelle-Aquitaine) où l’ensemble des financeurs, acteurs techniques et institutionnels réunissent leurs moyens pour proposer un cadre d’accompagnement et de soutien aux syndicats d’eau volontaires pour s’engager dans un programme d’actions préventives basées sur le volontariat, complémentaires à leurs outils curatifs et aux dispositifs réglementaires existants. Ces programmes d’actions sont formalisés dans des contrats territoriaux « pollutions diffuses », outils quinquennaux proposés par l’Agence de l’Eau Loire Bretagne.
Ces premiers contrats ont fait l’objet d’une prolongation d’une année par avenant (2015) pour mener leur évaluation puis pour construire la deuxième génération de programmes d’actions. Suite à l’évaluation (marché en groupement de commandes pour les deux syndicats d’eau, confié au cabinet d’étude SCE et à un sociologue spécialiste des questions environnementales), un dispositif de concertation a été mené pour co-construire avec les acteurs locaux de nouvelles propositions d’actions. L’Institut de Formation et de Recherche en Éducation à l’Environnement (Ifrée) a accompagné cette étape de dialogue entre les acteurs, où une large place a été faite au monde agricole, agriculteurs et Organisations Professionnelles Agricoles (OPA : FRAB, chambre d’agriculture, coopératives et négoces, APAD, CIVAM, centres de gestion, contrôle laitier, conseillers indépendants).
Le contenu de chacun des deux programmes d’actions a été établi aux vues de la vulnérabilité du bassin (critères hydrogéologiques et pédologiques) et des pressions recensées, facteurs propres à chacun des deux territoires, et sur la base du résultat de cette concertation. Ces travaux ont abouti au partage et à la signature par de nombreux signataires des deux contrats territoriaux Re-Sources 2016-2020 (27 signataires dont 15 OPA pour la Courance et 26 dont signataires dont 16 OPA pour le Vivier).
Des objectifs ambitieux sont fixés à l’horizon 2020 :
- Pour la qualité de l’eau : en matière de nitrates (des valeurs moyennes maximales et des pics à ne pas dépasser sont fixés par captage), en matière de pesticides (les valeurs seuils du SAGE sont reprises pour les eaux brutes : 0.1 microgramme/litre pour chaque matière active, et 0.3 microgramme/litre pour la somme des matières actives) et pour les molécules émergentes.
- Pour le développement de l’agriculture biologique : 10 % de la SAU pour le bassin du Vivier et 22 % de la SAU pour le bassin de la Courance. Les contrats territoriaux s’appuient sur des actions adaptées pour atteindre ces objectifs.
La stratégie intègre :
- des partenariats forts avec les organismes professionnels agricoles (OPA) œuvrant sur le bassin, ceux-ci intervenant en portant directement des actions d’accompagnement technique individuel des agriculteurs (diagnostic de conversion, simulation technico-économique, accompagnement annuel)
- des actions d’accompagnement collectif (journées techniques, groupes d’agriculteurs, voyages d’étude),
- la mobilisation des outils financiers du PDRR (Plan de Développement Rural Régional) et des fonds du second pilier de la PAC (aides agro-environnementales),
- une réflexion sur la maitrise du foncier, notamment sur les parties avales des bassins, où cinq des captages (2 sur le SEVC et 3 sur le SEV) sont en zone particulièrement sensible,
- la mise en place d’expérimentations (couverts végétaux, cultures associées, matériel agricole)
- l’accompagnement des porteurs de projets de maraichage biologique dans les périmètres de protection du SEV (localisés en ceinture urbaine)
- une place importante faite à l’innovation (développement de filières, marque de territoire) en lien avec les OPA et les collectivités ayant la compétence économique : la Région Nouvelle-Aquitaine, la CAN, la Cdc de Celles-sur-Belle, le PNR du Marais Poitevin,
- une communication auprès de l’ensemble des acteurs agricoles du territoire (agriculteurs, étudiants en agriculture)
- la mobilisation et l’implication de l’ensemble des élus des communes et des intercommunalités des deux AAC
- des actions dédiées au volet non agricole et destinées à sensibiliser et faire évoluer les pratiques des collectivités, des particuliers gestionnaires de réseaux, des entreprises, etc (communication vers le grand public, liens avec élus, agents municipaux et gestionnaires de voiries, intervention en milieu scolaire, implication dans les politiques publiques locales),
- une animation (2 postes à plein temps pour la Courance et 2,5 postes pour le Vivier) et une gouvernance (comités technique et de pilotage, commissions thématiques) adaptées pour les contrats territoriaux,
- des synergies avec les syndicats d’eau potable voisins du Sud Deux-Sèvres (SECO, SERTAD, SMAEP4B…) en ce qui concerne le développement de filières qui nécessite une vision à une échelle plus large et la mutualisation de moyens.
Par ailleurs, le SEV s’est appuyé sur Co-Click’Eau, outil participatif d’aide à la décision pour la construction du nouveau programme d’actions.
Un certain nombre d’actions sont mutualisées entre les deux syndicats.
Emblématique de cette union, les trois actions structurantes des programmes sont :
- Le recrutement d’animateurs agricoles dédiés à la préservation de la qualité des ressources en eau. Pour les premiers contrats (2010-2014), un animateur conjoint assure un ½ temps sur chaque syndicat. La réussite de cette action se traduisant par un besoin plus important d’animation agricole, un second animateur agricole est recruté au SEV en 2015 (le premier prenant un poste à mi-temps pendant une année puis un plein temps sur la Courance).
- Le portage du dispositif Mesures Agro-Environnementale territoralisées (MAEt) et aujourd’hui MAE climatiques (MAEC) sur le territoire des deux bassins de captage et du CNRS de Chizé (qui ajoute 22460 ha de SAU aux 24000 ha de SAU déjà présents sur les AAC) – identifié comme opérateur (historique) – intitulé « Plaines et Vallées de Niort Sud-Est ».
- Le plan bio, sous-partie du programme regroupant toutes les actions de développement de l’agriculture biologique (de la promotion des pratiques à l’accompagnement technique).
Les deux programmes de reconquête de la qualité de l’eau portés par le SEV d’une part et le SEVC d’autre part, sont chacun formalisés par un contrat territorial, outil de l’AELB qui réunit officiellement les partenaires financiers, institutionnels et techniques concernés. Ils consignent toutes les actions dont une partie vise des changements de pratiques et des évolutions de systèmes, dont le développement de l’agriculture biologique (actions signalées par « (C) » ci-dessous).
Outre les actions qui y sont décrites, d’autres initiatives répondent indirectement aux objectifs de reconquête de qualité d’eau : un programme de préservation de l’avifaune de plaine dont l’Outarde canepetière (espèce « parapluie » dont la protection permet de protéger la biodiversité en général) est mené par le CNRS sur le territoire depuis les années 2000 (zone Natura 2000).
Gouvernance
Dans le cadre des contrats territoriaux
En interne au SEV et au SEVC, au total, 4.4 ETP assurent la « Protection des ressources en eau » (2 ETP d’animation générale + 2 ETP d’animation agricole + 0.4 ETP sur les périmètres de protection et sur la communication. Ces animateurs coordonnent, planifient et mettent en œuvre en partie l’ensemble du plan d’actions et sont en lien avec l’ensemble des acteurs impliqués.
Monde agricole | Collectivités | Experts et organismes publics | Population et associations |
Bio Nouvelle Aquitaine (partenaire technique) Agrobio Deux-Sèvres (partenaire technique) Chambres d’Agriculture (régionale et départementale – partenaire technique) Coopérative d’Utilisation du Matériel Agricole (CUMA – partenaire technique)CIVAM Marais Mouillés (partenaire technique), Coopératives, Négoces agricoles (opérateurs économiques et partenaires techniques) :CAVAC, CEA Loulay, CORAB, OCEALIA, Sèvre et Belle, Terre Atlantique, TERRENA, VSN Négoce, CAVEB, APAD, ADEDS, Centre de gestion : CERFRANCE (partenaire technique),,Contrôle Laitier : Deux-Sèvres Conseil Elevage (partenaire technique),Conseillers indépendants SC2 Grandes Cultures, LVH | SEV et SEVC de la Communauté d’agglomération de Niort (porteur de projet) Région Nouvelle-Aquitaine (partenaire technique et financier) Parc Naturel Régional du Marais Poitevin (partenaire technique) Conseil départemental 79 (CD 79 – partenaire financier) Syndicats de rivière (porteur de projet) Les communes du territoire (partenaires techniques) | CNRS (porteur de projet) Agence Régionale de Santé (suivi des indicateurs) Direction régionales de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt Direction Départementale des Territoires AELB (partenaire financier) ARB (suivi qualité) Unité Mixte de Recherche (UMR) Agronomie et Sad-Apt (Sciences pour l’action et le développement – Activités, produits, territoires) de Grignon Institution Interdépartementale du Bassin de la Sèvre Niortaise (porteur de projets) Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (évaluation AAC) | Associations diverses : pêche, nature, environnement (partenaire technique) |
Les principaux partenaires techniques et financiers sont engagés via les contrats territoriaux (durée de 5 ans) avec l’AELB.
Des commissions agricoles et non agricoles, un comité de pilotage et un comité technique se réunissent 1 à 2 fois par an dans le cadre du plan d’actions pluriannuel des contrats territoriaux de façon à prendre les décisions qui jalonnent le programme. Les fiches-actions sont débattues et validées chaque année en comité technique et en comité de pilotage.
Eléments financiers
Ensemble du programme d’actions du contrat territorial : entre 100 000 et 250 000 euros par an pour chaque syndicat (financés à 65%).
Résultats
- Passage de 1,5% à 13% de la SAU en bio entre 2009 et 2019 sur les aires d’alimentation Vivier et Courance
- Passage de 2,9% (en 2008) à 10,5% (en 2019) de la SAU en bio sur le bassin du Vivier
- Passage de 1% (en 2008) à 22,8% (en 2019) de la SAU en bio sur le bassin de la Courance
Facteurs de réussite
- Politique publique cohérente à l’échelle régionale avec le programme Re-Sources et complétée localement par une dynamique territoriale
- Incitation supplémentaire à la mise en œuvre d’un accompagnement territorialisé destiné aux agriculteurs via l’enjeu biodiversité
- Présence de relais de terrain efficaces et coordonnés
- MAEt très incitatives jusqu’en 2014
- Fort effet « boule de neige » grâce à des producteurs biologiques reconnus techniquement et de plus en plus nombreux (diffusion des pratiques auprès d’agriculteurs voisins ou partenaires)
- Faible potentiel des terres agricoles sur 75% de la zone qui atténue, voire annule les baisses de rendement occasionnées par une conversion en bio
- Filière structurée existante pour les grandes cultures et des filières locales bien présentes
Difficultés rencontrées
- Territoire de grandes cultures où les freins psychologiques sont forts
- Mesures de protection de l’environnement vécues comme des contraintes par les agriculteurs
Perspectives
- Les syndicats d’eau souhaitent renforcer les partenariats avec les structures économiques locales pour vulgariser l’agriculture biologique (coopératives et négoces agricoles).
- Pour le bassin de la Courance, bien qu’il s’agisse d’une zone à dominante grandes cultures, un objectif de maintien de l’élevage est affiché et des actions déclinées sur ce thème, notamment via le dispositif des MAEC et des études de filières. Pour les grandes cultures, les perspectives de travail concernent l’accompagnement technique de la couverture des sols et des couverts estivaux, ainsi que le suivi des reliquats azotés dans les sols (en bio comme en conventionnel). Un travail est également mené autour de la délimitation précise des zones à risques et du mécanisme hydrogéologique de dénitrification naturelle. La dynamique de développement de l’agriculture biologique se poursuit depuis 2009.
- Le SEV s’est engagé dans des projets de recherche et développement, notamment avec le Bureau de Recherche Géologique et Minière (BRGM) et des équipes de l’UMR de Grignon (Institut National de la Recherche Agronomique et AgroParis Tech). Le principe est de pouvoir évaluer et quantifier l’impact réel des pratiques agricoles sur la qualité au niveau de la résurgence de la nappe. Des modèles hydrogéologiques et agronomiques sont en cours de développement et permettront de mieux soutenir et promouvoir les pratiques minimisant les pressions sur la nappe.
C’est à refaire
- Intérêt d’une animation agricole en régie
- Engagement des partenaires via un contrat territorial
- Accompagnement renforcé sur l’agriculture biologique
Contacts
Cédric BILLY • Animateur agricole • Syndicat des Eaux du Vivier • cedric.billy[at]eaux-du-vivier.fr
Alexis INGRAND • Animateur agricole • SEVC • alexis.ingrand[at]agglo-niort.fr
Olivier CAILLÉ • Animateur • SEVC • olivier.caille[at]agglo-niort.fr