Présentez-vous, votre origine professionnelle, votre mandat au sein de Grenoble Métropole
Elue depuis 2008, tout d’abord comme conseillère municipale, puis maire depuis 2014 d’une commune de 1000 habitants, je suis vice-présidente à Grenoble Alpes Métropole sur les thématiques de l’agriculture, de la filière bois, de la montagne et de la condition animale. Je suis petite-fille d’agriculteur, j’ai été chargée d’étude en histoire sociale, puis responsable au sein de structures d’insertion professionnelle.
Quels sont vos objectifs, vos ambitions en matière de transition agricole et alimentaire sur votre territoire ?
Au sein de la Métropole, l’agriculture et l’alimentation ont été placées comme marqueurs de ce mandat avec une ambition forte et affirmée de fournir des aliments sains et abordables à tous, tout en minimisant le gaspillage, en préservant la biodiversité et atténuant les effets du changement climatique.
Vers une division par 4 de l’usage des produits phytosanitaires et de synthèse et l’arrêt des engrais chimiques et minéraux sur le territoire
Nos objectifs consistent à maintenir le potentiel productif agricole qui est composé de 220 exploitations, pour 245 exploitants, tout en faisant évoluer les pratiques agricoles pour contribuer aux transitions et améliorer la résilience des exploitations, pour construire des filières équitables, permettant de faire évoluer les pratiques de tous les habitants vers une consommation et un approvisionnement alimentaires plus local et plus respectueux de l’environnement, dans la perspective de bâtir collectivement un système alimentaire territorial durable.
Pour cela, nous agissons sur la protection du foncier, sur l’accueil et le renouvellement des exploitations agricoles, la diversification des filières, ainsi que la promotion des circuits courts et le développement de l’agroécologie.
Cette politique a déjà porté ses fruits, avec une augmentation significative des surfaces agricoles cultivées en agriculture biologique, passant de 630 hectares en 2020 à 1130 hectares en 2023, ainsi qu’une augmentation du nombre d’exploitations en bio, passant de 47 en 2020 à 58 en 2023.
Comment se traduisent ces ambitions dans les documents de politiques publiques (délibérations, textes cadres, divers outils de planification) ?
Une délibération cadre définissant la stratégie agricole et alimentaire pour la période 2024-2030 a été votée à l’unanimité le 29 mars 2024 et formalise l’intention de la Métropole de soutenir la mutation agroenvironnementale des exploitations et des circuits agroalimentaires, en mettant l’accent sur le développement de l’agriculture biologique. Cette stratégie, qui comporte plus de 60 actions, a été construite en s’appuyant sur les recommandations de la convention citoyenne pour le climat.
Une stratégie construite en s’appuyant sur les recommandations de la convention citoyenne pour le climat.
La Métropole accorde une attention particulière à la préservation des terres agricoles. Cette préoccupation se traduit concrètement dans les documents de planification tels que le Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT) et le Plan Local d’Urbanisme intercommunal (PLUi), où une volonté affirmée de protection des espaces agricoles est mise en avant. En 2019, lors de la mise en place du PLUi, plus de 150 hectares de terres agricoles ont été préservés par rapport aux documents d’aménagement communaux précédents et un travail est d’ores et déjà engagé pour inscrire les perspectives du ZAN dans nos futurs plan d’urbanisme.
La Métropole favorise également la création de Périmètres de Protection des Espaces Agricoles et Naturels (PAEN), déjà mis en place à Sassenage en 2019 et en projet sur 9 autres communes entre le Drac et le Vercors. Elle joue un rôle de régulateur foncier en intervenant directement avec plus d’une centaine d’hectares acquis afin d’éviter l’appropriation des terres agricoles par des non-agriculteurs, la transformation des parcelles en espaces de loisirs, et la concentration excessive des exploitations. Cette intervention vise à permettre la restructuration de zones agricoles de qualité.
Par ailleurs, la Métropole a signé une convention pluriannuelle de partenariat avec la SAFER (Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural) et l’Établissement Public Foncier Local (Opérateurs d’Intervention Foncière). Cette collaboration lui permet d’intervenir pour le maintien des terrains agricoles, la facilitation de l’installation d’agriculteurs, la régulation des prix fonciers et la préservation d’une agriculture compatible avec les enjeux de protection de la biodiversité et de la qualité de l’eau.
A l’échelle du grand territoire, la Métropole a joué un rôle moteur dans la création et l’animation du Projet Alimentaire inter-Territorial (PAiT) illustrant notre engagement en faveur d’une alimentation durable et d’une relation harmonieuse entre le milieu urbain et rural.
D’autre part, la Métropole a adhéré aux accords internationaux majeurs, tels que le Pacte de Milan sur la politique alimentaire urbaine en 2015 et la Déclaration de Glasgow sur l’alimentation et le climat en 2021.
Décrivez 3 actions phares/emblématiques que vous portez en faveur du développement de l’agriculture biologique
Accompagnement des pratiques agricoles
La Métropole déploie des dispositifs d’aides à l’installation et à l’investissement en faveur des agriculteurs du territoire qui encouragent davantage les pratiques agricoles orientées vers les filières courtes, la préservation du milieu et le label Agriculture biologique. De plus, la Métropole soutient l’installation d’agriculteurs prioritairement en agriculture biologique, sur ses propres propriétés agricoles où elle privilégie la contractualisation en Bail Rural à clauses Environnementales. Elle entreprend également des travaux de restauration de milieux, avec la plantation de haies, la création de mares…
Structuration des débouchés
La Métropole a mis en place plusieurs actions visant à structurer les débouchés en agriculture biologique. En tant que gestionnaire des équipements métropolitains tels que le Marché d’Intérêt National (MIN) et l’abattoir, elle joue un rôle central dans la promotion et le développement des filières territoriales et biologiques. La création du Pôle agroalimentaire, la modernisation de l’abattoir, la transformation du MIN en plateforme logistique pour les « derniers kilomètres », ainsi que le développement de la légumerie sont autant d’initiatives stratégiques. Au MIN, la location de trois boxes à des fournisseurs en produits locaux (notamment le box fermier pour les restaurants, Mangez bio Isère pour la restauration collective et le Pôle agroalimentaire pour les grandes et moyennes surfaces et le commerce de proximité) favorise la valorisation des productions bio.
De plus, la Métropole apporte un soutien technique et financier aux filières labellisées AB ainsi qu’aux groupements et coopératives d’achat.
Elle agit également pour mobiliser les collectivités à la mise en œuvre de la loi EGALIM, en proposant des formations et un accompagnement aux communes volontaires pour accroître les approvisionnements en produits bio et de qualité, et pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Ce travail se concrétise notamment par la mise en place d’un réseau de communes engagées en faveur d’une restauration collective durable, avec 11 communes déjà accompagnées dans cette démarche. Ces actions contribuent ainsi à structurer les débouchés en AB et à favoriser le développement d’une agriculture biologique locale et durable.
Sensibilisation et promotion
La Métropole de Grenoble déploie diverses actions de sensibilisation pour promouvoir une agriculture durable. Elle soutient le réseau des fermes buissonnières qui accueille les classes du territoire dans des exploitations agricoles. Elle mobilise chaque année les citoyens à travers le Mois de la Transition Alimentaire et propose un programme élaboré et co-construit avec la participation de 32 associations pour des actions, rencontres et débats. Nous éditons aussi un guide des producteurs locaux qui est communiqué aux citoyens et disponible sur le site Internet de la Métropole.
Des débats citoyens sur l’alimentation sont en cours pour faire suite aux propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat, avec notamment la mobilisation de 80 « ambassadeurs pour une alimentation durable ».
Dans le cadre de l’Observatoire du PAiT, en partenariat avec l’Agence Urbanisme Région Grenobloise, un travail exploratoire sur le BIO a également été initié.
Qu’est-ce qui a motivé votre adhésion au réseau des Territoires Bio Pilotes ? Qu’est-ce que cela vous apporte ? Quelles sont vos attentes ?
Il s’agit de faire réseau et d’échanger sur les enjeux, les objectifs et les actions afin de partager sur nos pratiques respectives et s’inspirer des réussites des territoires bio pilotes. Il est aussi important de s’appuyer les uns sur les autres pour permettre à nos territoires de construire un système agricole et alimentaire durable, protecteur du sol, des agriculteurs et des habitants.